Un espion, on l’imagine en danger à chaque instant : accroché à un train filant à vive allure, pris en otage, sautant d’un hélicoptère… Mais la réalité est plus calme. En mission à l’étranger, «on travaille au sein d’une ambassade, en général. On a des bureaux sécurisés», racontait l’ancien agent secret Olivier Mas* à la radio RMC, en octobre dernier.
Bâtiment qui représente un pays dans un autre pays.
Pour trouver les informations qui les intéressent, les officiers de renseignement lisent beaucoup les journaux, épluchent des sites internet, bref ils regardent des documents que tout le monde peut consulter. Mais pas seulement. «On recrute des personnes qui ont accès à une information qui nous intéresse», indique Paul Charon, spécialiste du renseignement à l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire (Irsem) et lui-même ancien officier de renseignement.
Ces personnes s’appellent des sources. Il peut s’agir par exemple de membres d’une organisation terroriste ou d’ingénieurs qui travaillent dans une usine fabriquant secrètement une bombe nucléaire. «En Corée du Nord [un pays où le peuple n’est pas libre et subit des menaces], on ne peut pas recruter de sources, un officier serait arrêté tout de suite. Mais on peut recruter un diplomate nord-coréen qui est en poste à l’étranger», précise Paul Charon.
Personne qui représente son pays à l’étranger.
Depuis des années, l’Iran est soupçonné de vouloir fabriquer une bombe nucléaire en secret, notamment dans ce lieu. Photo Henghameh Fahimi. AFP
Les sources collaborent généralement pour gagner de l’argent ou pour empêcher des gens qu’elles connaissent de faire quelque chose de mal. Mais attention, «une source humaine risque sa vie, la moindre erreur peut être fatale», précise Paul Charon. Pour que personne ne sache qu’ils rencontrent des sources, les agents savent repérer quelqu’un qui les suit en regardant dans le reflet d’une vitrine, changer rapidement d’habits, semer un filocheur dans un parking…
Personne qui prend une autre personne en filature, qui la suit secrètement.
Grâce aux renseignements de leurs sources, les agents secrets identifient des personnes et des lieux à surveiller. Ils peuvent alors secrètement écouter des conversations téléphoniques ou lire des échanges de mails, prendre des photos grâce à des drones…
Petits avions télécommandés qui peuvent filmer ou prendre des photos.
À l’étranger, certains agents agissent sous leur vraie identité, d’autres non. Ils adoptent un faux nom et racontent qu’ils travaillent dans une ambassade, qu’ils sont chercheurs ou journalistes.
Compléter un puzzle
Mais les officiers envoyés secrètement dans des pays étrangers, ce n’est qu’une petite partie du travail de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) ! «La plupart des agents de renseignements sont des analystes. C’est un travail de bureau, assez proche d’un travail de chercheur ou de diplomate», note Paul Charon.
Personnes chargées de recueillir et d’analyser des informations.
Les agents présents à l’étranger récoltent des informations et les envoient à leurs collègues à Paris, qui les vérifient et les analysent. Ils disent ensuite aux agents sur place quelles nouvelles informations ils doivent trouver. «Le travail d’analyste c’est comme un puzzle. Le but, c’est de compléter ce puzzle», résume Paul Charon.
Les bureaux de la DGSE, à Paris, sont bien gardés. Photo Martin Bureau. AFP
*Il a écrit le livre Profession espion (éditions Hoëbeke). Olivier Mas n’est pas son vrai nom.